Genèse d’un outil de la création

Début septembre 1975, je rentre d’un séminaire de créativité.

48 heures d’entraînement à laisser libre cours à l’expression de l’émotivité, de l’imaginaire, au rééquilibrage des 5 sens… Durant les 2 nuits du séminaire, nous avons peu dormi. Bien dans ma peau mais physiquement fatiguée, je m’endors. Très vite dans le sommeil, je prends conscience d’une valse de symboles qui essayent de se mettre en ordre :

  • Symboles de l’alchimie
  • Symboles de l’astrologie, essentiellement les planètes et leurs correspondances avec les dieux de l’olympe
  • Symboles de la kabbale, les lettres hébraïques et leur correspondance numérique
  • Symboles mathématique et physique.

Instinctivement, je reste dans cet état, entre veille et sommeil, spectatrice plus qu’actrice de ce remue-ménage symbolique. Il se passe quelque chose en moi. Un processus analogue à celui du mélange les boules du loto le soir du tirage. Par bonheur, mon habitude de me saisir du déroulement des opérations ne se déclenche pas. Je suis fatiguée et laisse faire. J’aime les symboles. Il y a longtemps que je soupçonne que ces différentes approches symboliques ont une subtile correspondance entre eux.

24 ans de recherches méticuleuses, au cours desquelles j’ai glané des bribes de connaissances dans des tonnes de gangues, charriées par ceux qui se réclament des traditions ésotériques, sont à l’origine de cette sarabande. Ces symboles, je les ai tracés des centaines de fois, soigneusement, chacun dans son propre système.

Ici les systèmes éclatent, les symboles reprennent leur autonomie, comme si dans leurs mouvements dans l’espace, ils allaient butiner dans ma mémoire. Ils s’enrichissent, s’enflent, se densifient au fur et à mesure qu’ils se chargent de sens.

Le corps, la Prima Materia ; Hadès, le Dieu des enfers ; le corps du Christ ; Heiter, l’énergie de la matière dense ; Pluton, dont la symbolique de l’axe Pluton Neptune indique qu’il puise l’énergie dans la Terre ; le chiffre 8.

L’homme virgule, la lumière de l’âme, l’amour, la déesse de l’amour, Vénus, source de lumière, soleil, Apollon, rayonnement, vie, individuation, le Noun, le Yahvé, le Dieu des juifs, deux vies, deux vies qui s’interfécondent.

La Lune reflète la lumière du Soleil, la lune dans le tarot du Moyen Âge, lunaire, lunatique. La lumière dans la nuit – la nuit du corps – Le Soleil, la lumière du jour. Lune reflets, images, imaginaire, le soleil source réelle authenticité. Le Soleil, Râ, Dieu des égyptiens, le pharaon incarnation de Râ.

Saturne, chronos, le temps, la concentration. Zeus, Jupiter force d’expansion, la Science, vision expansionniste de l’univers, l’espace. L’aviation, le vol d’Icare. Uranus. Ouranos père de Chronos. Solve. Coagula. Alep. Bereshit, etc…

Opposition. Conflits. Contradiction. Complémentarité. Antagonisme, dualité binaire. Linéarités. Tiers exclus. Co-existence. Co-présence. Sujet. Verbe. Complément. Différence de niveau de subtilité. Point d’intégration. L’unité s’exprimant par ces deux contraires. Le visible, le manifeste mesurable, fixe, figé, le système sensoriel, mouvant, les méthodes : mise en mouvement du fixe.

Le corps de l’homme, le corps de l’univers, ce qui se mesure, ce qui peut être mis en mouvement. Monde du quantitatif. Dieu le père, Dieu le fils et Dieu l’esprit Saint, unique et triple et non double.


L’unité, le binaire, le ternaire. L’ennéade de Pythagore. La tridimensionnalité de l’unité. L’égrégore. le corps, l’âme, l’esprit, etc…
48 heures durant, des chiffres et des nombres, des signes + et – , pôles positif et négatif d’un accumulateur, entre eux l’arc, d’une autre nature, des symboles se combinent et se séparent, se recombinent dans une vision intérieure.

Toujours sur ce mode intérieur analogique, haché, voisin d’un délire, faute d’en percevoir le sens. Le sens, à la fois signification, orientation et direction. Ma fatigue physique me préserve de l’habitude de chercher à orienter virgule à diriger pour « faire du sens » (to make sens). Je reste dans cet état entre veille et sommeil, les symboles s’entrechoquent, se combinent et se séparent, s’associent entre eux. Ils ont chacun leur logique propre, leur vie à eux, une logique en soi. Conscience de l’en-soi. Ils coexistent en chaque chose, les 27 de la Qâbala, les 9+1 de l’astrologie, les 3 et les 4 de tout ésotérisme, les 3 + 4 = 7, 3×4=12, 3² = 9, 33 = 27, mais les 9 sont 10 ?

Ah oui, Hermès et le messager des dieux, nature différente, les 10 deviennent 9 + 1 messager. ADN messager ?
L’unité s’exprime par un binaire contradictoire.

L’unité n’est pas ce qui s’exprime en 2 contraires, l’unité et l’ensemble des 3 points
3 niveaux : les 2 contraires
le point d’intégration qu’ils expriment et l’ensemble des 3
deux personnes : 2 pôles
La relation entre elles l’arc
D’une nature plus subtile
L’ensemble de la relation – égrégore – la relation plus les 2 personnes en interaction
L’homme lui-même :

  • a un corps, outil de son incarnation, sa partie la plus visible, la plus dense.
  • une âme, des sentiments, une échelle de valeur, des stratégies
  • ce qui forme sa permanence ce qui s’incarne se dote d’un corps.

Dualité corps-âme, monde concret, monde sensible en éternel antagonisme quantité-qualité, objectif-subjectif, rationnel-irrationnel (le cœur a des raisons que la raison ignore)

Quel est le point d’intégration, l’homme étant le tout ?
La tradition dit : l’Esprit.

Le corps est concret, mesurable, visible ; l’âme sensible ; l’esprit conceptuel.

Mais il y a du sensible dans le corps ?
Sensible du corps, reflet du véritable sensible ?

la lune, reflet de la lumière du soleil, sensible du corps point

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y a de la pensée dans le sensible, du concret dans la pensée, du sensible dans le concret. Tout est dans tout. (Hermès Trismégiste)
L’Homme en soi est un microcosme fait à l’image et à la ressemblance de Dieu – Dieu – transcendance – intemporel. L’Homme médiateur entre le visible et la transcendance.

Lentement la veille gagne sur le sommeil. La sarabande se calme le corps reprend ses droits, faim, soif. Je fais couler un bain, je prépare du thé ; mon plateau a-t-il une âme ? Un esprit ? Qu’est-ce que l’esprit ? Comment tirer tout cela au clair.

Je sens l’importance de ce qui vient de se passer. Je griffonne mes 3 bulles, les 3 bulles dans les 3 bulles, et je me mets au travail.

Tout ce vécu symbolique est chargé d’une très forte émotion et s’est donc imprimé clairement dans ma mémoire. La logique de la co-existence de niveaux différents, interagissant, d’éléments distincts, à la fois dotés d’une logique interne, spécifique, et d’une relation avec d’autres éléments de même nature ou de nature différente, me séduit. Je vis d’abord que la non-différenciation de logiques différentes menait aux blocages ‘’paradoxaux’’. Que l’ensemble des éléments interagissant se comportaient en ‘’système’’. Mais j’ignorais les mots ‘’paradoxe’’, ‘’théorie des systèmes’’.
Je compris d’abord qu’il était possible de regarder le monde, l’Homme et le cosmos – Dieu – la Transcendance avec d’autres lunettes. Ce n’est que beaucoup plus tard que j’ai appelé cela ‘’une autre représentation du réel’’.

Des milliers d’informations stockées changeaient de sens, se transformaient, prenaient une nouvelle importance. bien des hommes du passé ont parlé de ce point de vue. Les prophètes, les sages, bien des ‘’génies’’ ont puisé dans cet autre regard des espaces de liberté qu’ils ont désespérément cherché à nous léguer. Einstein me parut figure essentielle, non pas pour ses apports aux connaissances en physique, mais pour la réaffirmation, la revitalisation du concept de ‘’relativité’’. Regarder nos acquis, nos sentiments, nos idées et nos idéaux dans une nouvelle relativité.

La découverte de ce nouveau jouet entraînera le désir de le mettre au point, de le tester, d’abord conceptuellement.
Que pouvait-on voir avec ses lunettes ? La grille complétée, mais mal assimilée, je l’ai trafiquée. Complètement conditionnée par une vision hiérarchique, je n’ai pas résisté à superposer les triangles.

Transformant ainsi ma vision même. Cette tricherie qui a duré plusieurs années m’a néanmoins servi à trouver les correspondances, à organiser les différents systèmes symboliques. Lorsque les différents systèmes devinrent cohérents, le nom surgit.

Outil de développement de la Conscience, structure, Conscience se développant par l’expérience de la différenciation. Un groupe d’amis travaillant à le compléter, à l’expérimenter sur eux-mêmes, sur les objets qui les entouraient, sur les situations qu’ils vivaient, le nommèrent Structure de Conscience Différentielle.
Basée sur une importante activité symbolique, elle ne pouvait être valablement publiée telle quelle comme une nouvelle théorie. Tant de théories sont publiées et tombent dans l’oubli. Je résolus de l’appliquer avant d’en parler. Les quelques personnes les plus proches, happées par l’aventure d’une nouvelle vision, lui trouvèrent des applications multiples.

On me proposa une entreprise en déconfiture. Je décidais d’en faire un champ d’expérimentation de cette nouvelle approche du réel. Parallèlement nous avons fondé l’Institut de Recherche sur la Communication, plus tard le Club Innovation Alsace. Ensuite vint la création des Éditions Cohérence, plus tard rebaptisées Sophon. Après ces multiples exercices, la grille de décodage du réel nous parut exportable. Un texte fut rédigé à la suite d’un exposé oral dans un cours de formation à la Création et à l’Innovation.
Elisabeth Meichelbeck
5.10.1982 Paris