Des temps et de la durée

10 ou 20 ans de vie active à inscrire dans les temps. Qu’est-ce à dire ? « 10 ou 20 ans » désignent une durée, entre aujourd’hui et une date ultérieure. Cette durée, nous pouvons l’exprimer en décennies (1 ou 2 décennies) en mois ( 120 à 240 mois) en jours ( 3653 à 7305 jours) etc.

Si nous attendons la quille ou la retraite, nous barrerons chaque jour la durée écoulée, comptant par différence le nombre de jours ou de mois à tirer !

Si, par contre, nous avons un projet pour cette durée, elle cesse d’être une bande transporteuse qui nous mène à la mort, mais devient au contraire un capital à mettre en valeur.

La durée linéaire devient un volume de temps que notre esprit nous permet de percevoir comme une globalité dans laquelle nous pouvons organiser la création.

Passer de la notion de durée à la notion de temps implique le passage d’une vision séquentielle à une vision d’ensemble ; une séquence quelconque devient une des dimensions d’une structure conceptuelle beaucoup plus complexe.

La durée nous emporte ou coule entre les doigts, le temps, au contraire, devient contrainte choisie délimitant un champ, une sphère de liberté, dans laquelle nous pouvons exercer notre liberté.
La durée nous mène du passé vers l’avenir, vers une issue conçue comme fatale ; la durée nous emmène, nous véhicule et nous charrie, comme un fleuve charrie les alluvions.

Le temps, nous pouvons apprendre à le choisir, à le maitriser, à le traiter, à le rendre réversible. Ainsi la découverte de la conscience du temps nous permet de nous projeter dans l’avenir et par un retournement de la pensée, de décider de, et dans notre présent, en fonction de sa contribution à notre avenir.

Entraînés, il nous deviendra possible, par des actes complémentaires judicieux, dans le présent, de valider notre passé, parfois lointain, en lui donnant un sens, une signification nouvelle par rapport à un avenir choisi… Notre vie, au lieu d’être perçue comme quelque chose qui se déroule inexorablement, deviendra une entité vivante, un tableau ou une œuvre d’art que chaque jour nous pouvons compléter, transformer enrichir. Rien, même pas notre passé, ne restera ce qu’il fut ; grâce à la transformation de l’importance relative des éléments qui le comparent, celui-ci deviendra un sous-ensemble mouvant qui pourra être comparé à l’ensemble de la vie en devenir. Nous vivrons dans notre vie et ne la regarderons plus s’écouler !

Jean-Charles PICHON, dans son œuvre maîtresse « Le Jeu de la Réalité », notamment le tome II « La machine de l’Éternité » étudie soigneusement, les implications du temps, notamment sous sa forme la plus importante pour l’Histoire des Hommes et des Mythes : les cycles.
La conscience du Temps ne nous est pas complètement étrangère, mais nous sommes peu entraînés à nous en servir activement. Un paysan est intimement relié à la cyclicité annuelle qui rythme les saisons lui indiquant les temps des semailles et des moissons. Nous n’avons pas encore pleinement réalisé que les idées sont comme des graines, qu’elles obéissent, pour leur inscription dans les faits, à des cycles précis d’ensemencement, de maturation et de récolte.

Pourtant, depuis la préhistoire nous parviennent des bribes de cette connaissance cyclique. Elle a préoccupé les sages et les philosophes de tous les temps ( v. le tome I : Les Précis Ridicules du
« Le Jeu de la Réalité » de Jean-Charles PICHON Éditions Cohérence);

La durée d’un cycle à l’autre est très variable :
24 heures pour un jour, environ 28 jours pour une lunaison, environ 365 jours pour une année. Mais chaque cycle, quelle que soit sa durée, se compose d’une succession de phases. Chaque phase particulière se présente dans un ordre de succession immuable et dans la même relativité par rapport au cycle complet. Si nous divisons le cycle en 2, nous aurons, à partir du début du cycle :

  • une phase ascendante : de minuit à midi
  • de la nouvelle lune à la pleine lune
  • du solstice d’hiver au solstice d’été

et une phase descendante : l’autre partie des cycles.

Si nous divisons le cycle en 4, nous aurons, à partir, du début du cycle, le premier quartier :

  • du solstice d’hiver à l’équinoxe du printemps
  • de la nouvelle lune au premier quartier
  • de minuit à l’aube
  • etc.

Si nous divisons le cycle en 12, nous aurons :

  • la structuration, la connaissance et la diffusion qui correspondent aux étapes successives du premier quartier ou de l’hiver
  • le choix du germe, la fécondation et la démultiplication à l’identique qui correspondent au 2ème quartier ou au printemps
  • la maturation, l’apparition et la récolte qui correspondent au troisième quartier ou à l’été
  • la transformation et la transmission qui correspondent aux étapes successives du dernier quartier ou de l’automne débouchant sur l’amorce d’un nouveau cycle commençant par la structuration… etc… 11 et pas 12

Au niveau microscopique des cycles de durée infimes sont étudiés par les physiciens, au niveau macroscopique des cycles, de durée longue (12 ans, 29 ans… 180 ans… 26000 anis, etc…) sont étudiés par les philosophes et les mythologues depuis la plus haute Antiquité. La durée et le temps se trouvent dans une relativité réciproque permettant à l’un de quantifier l’autre.
Ainsi, si la durée est comptée en jours, elle permet de quantifier l’unité lunaison (env. 28 jours) ou l’unité année solaire (env.365 jours).
Si la durée est comptée en heures, elle permet de quantifier l’unité journée (24 heures).
Si elle est comptée en années, elle permet de quantifier les cycles plus longs de 12 – 29 – 84 ans etc…
De même, nous pouvons dire que l’heure : 1/24ème de la journée, la minute 1/60ème de l’heure, relativisent ainsi la durée du temps.

L’homme n’a pu qu’observer les cycles : la journée, la lunaison, l’année. Il est libre de fractionner ces unités cycliques selon l’usage qu’il souhaite en faire. Mais s’il veut connaître les lois pour s’en affranchir, il lui faut renouer avec cette connaissance des cycles qui s’imposent à lui comme à son environnement, et de là, retrouver la signification de la durée qui n’est que fraction des temps.

Inscrire nos 10 ou 20 ans de durée dans les temps peut prendre plusieurs aspects :

1) Initier des cycles pour créer nos propres projets : il nous faut alors déceler :

  • les douze phases à respecter dans l’ordre
  • la durée spécifique des cycles compatible avec les créations d’entreprises.

2) Contribuer à des cycles déjà en cours et déceler les phases actuelles et à venir

  • que nous entrions dans des créations initiées par d’autres
  • ou que nous participions à des dynamiques macroscopiques où la durée complète du cycle dépasse la vie humaine.

Dans tous les cas, il est important de repérer la durée du cycle où au moins celle de la phase qui nous préoccupe. Chaque type de cycle requiert un autre référentiel, une relativité différente.
Une durée d’un an n’a pas la même signification pour construire un château de sable, une entreprise, une politique ou une civilisation.
Pour réussir nos entreprises ou nos vies, il est important de ne pas nous tromper de relativité.

Elisabeth MEICHELBECK
Strasbourg, 30.4.82